vendredi 8 juillet 2011

J'aurai toujours les yeux plein d'eau, mais j'les aurai toujours ouverts.


Pour le mot de la fin, j'ai laissé passer les jours, les heures qui parfois, s'allongeaient, vicieuses. Un dernier billet, pour cloturer un an de confidences, ça se pense, ça se mûrit, progressivement. Il s'agit de bien écrire, de bien conclure. Et surtout, d'en avoir envie.

Je réapprends à vivre en France. Oui, c'est un réapprentissage. Je n'ai pourtant pas changé de culture, c'est toujours un peu la même chose. Je connais très bien mon pays, il y a des attaches, des lieux qui ont du sens pour moi, des visages qu'il est bon de retrouver. Mes parents, mes amis, ces âmes qui nous manquaient un peu, au fond de nous.

Mais vite arrive le dégout, la lassitude, l'ennui. J'ai peut-être trop attendu de tous et de tout, et rapidement, je veux être seul. Que répondre, quand chacun me demande "Alors, c'était comment?". Que dire, quand on insiste pour savoir ce qui m'a marqué là-bas. Là-bas. C'est déjà loin. Trois semaines.

Il y a deux types de personnes: ceux qui n'ont pas changé, les mêmes. Leurs problèmes n'ont pas évolué. Ma mère, mes grands-parents. Mais le plus rageant, ce sont ces amis, qui restent identiques, dans un manque d'ambition flagrant, qui se bornent au plus simple, sans voir d'autres limites que celles de Lyon. Communs, sans aucun fond marquant. J'ai honte de les mépriser. Je les aimais, pourtant. Et je vais réapprendre à les aimer.

Et puis, il y a ceux qui partent. Attirés, comme moi, par le néant de l'inconnu, vers des terres que je connais, ou pas. Ceux qui risquent un bagage, un pied-à-terre, et se hasardent dans un pays étranger, à la langue et aux coutumes très différentes. Ils volent déjà. Ceux-là, je les jalouse, mais je suis surtout heureux. Je connais leurs angoisses, leurs attentes, et je peux dès maintenant appréhender, avant eux, leur retour, aussi difficile que le mien.

Parfois, j'ai des nouvelles de l'autre côté. La vie continue, pour eux. Il manque peut-être quelqu'un, dans leur vie, mais ce n'est qu'une petite partie d'eux-mêmes. Alors, les jours s'avancent, ils vivent ce qu'ils devaient vivre. Si j'avais été là, ç'aurait été peut-être la même chose.

Et moi, dans tout ça? J'ai changé. Je ne suis plus le même. On voudrait me considérer comme un enfant, comme celui d'il y a un an. Sottises. On voudrait me garder, pour les années à venir. Mais dans ma tête, je ne suis pas encore là. Je flotte, un peu quelque part, entre Québec et Lyon, douloureux et plein d'envies. La première: revenir. Rentrer à la maison, là-bas.

Pourquoi être parti au Québec? Je n'ai toujours pas trouvé de réponse précise et unique. Mais d'autres réponses, à d'autres questions. Il y a des espoirs, des lignes de fuite, des plans qui se dressent, et l'horizon, toujours incertain, adopte malgré tout une certaine couleur. Ma vie en bleu et blanc, le coeur à l'ouest, un accent à couper au couteau dans les oreilles, je continue ma route.

Lyon, le 8 juillet 2011

samedi 18 juin 2011

Un très très grand détour pour aboutir seul dans un escalier.

Qu'on me pardonne, pour ce manque de nouvelles. Après Seattle, tout s'est enchainé, très vite, les kilomètres, les jours. Impossible de donner quelques impressions, via le blog. Je jouerai avec le temps, plus tard, pour écrire des articles sur ce que j'ai vu, ce que j'ai entendu. Patience...

Nous sommes le 18 Juin. Demain, Montréal, à 23h45, je m'envolerai pour la France. Arrivée le 20 Juin, à 13h heure locale, aéroport de Lyon. Du 20 Août au 20 Juin, une boucle qui se termine.

Depuis jeudi, nous sommes à Québec. Je fais découvrir "ma ville" à Anais, mais au fond, je suis absorbé par mon départ. Tant de choses à faire, à terminer; en fait, il n'y a que des adieux. Mais, comme à mon habitude, je me fais une montagne, des petites choses qui finalement, ne nécessitent qu'une minute, un bécot, et un signe de la main.

Justement, à cette heure, mes adieux sont faits. Une petite dizaine de personnes, réunies pendant un 5 à 7 en l'honneur de mon départ. Quelques français, mais surtout des québécois: Jean-Michel, Marc-Olivier, Mélodie, Justin, Thomas, Sophie. Il manque bien deux trois personnes de la Belle-Province, mais ce n'est qu'une question de mois, avant que nous nous revoyons. Et puis, il y a Eléonore et Aurélie, Nadine, Anais. Tout ce monde qui, en dix mois, a pris tant d'importance à mes yeux. Je photographie chaque visage dans ma tête, par peur d'oublier ces traits que j'ai aimés; j'absorbe les rires, les voix, les accents de tous, et en fais un patchwork de souvenirs. Je serre Sophie dans mes bras, promets de revoir Mélodie en France très vite. Des mots, afin d'atténuer la séparation, et pour remplir un vide qui, de toute façon, fera toujours de la peine.

J'ai aussi fait mes adieux à Francis, en plusieurs temps. Je veux me rappeler de tout, mais surtout de ces deux heures, sous un arbre, par une journée de juin chaude et étouffante. A revenir sur toute mon histoire, cette année passée ici. Il m'écoute, réponds par un hochement de tête, et quand je commence à angoisser, me prend la main, et me rassure. Un ami, avant tout. Un regard, qui en dit long, et réussit à calmer mes craintes, pour un temps. Peut-être l'une de ces personnes, avec qui l'on partage un bout du chemin, et qui, en peu de temps, réussissent à vous changer entièrement.

Oh oui, j'ai pleuré. Pas autant que je le pensais. Mais au fond de moi, il y a ce grand vide qui me prend, entièrement. Je regarde mes amis, je regarde Québec, et je réalise enfin que tout cela avait une fin. Qu'elle est là, à quelques heures.

Je me rassure, projette des vacances, très souvent. Et surtout, l'idée du doctorat me tient éveillé, me permet de survivre, dans un espoir absolu de revenir. J'entreprendrai ce doctorat, je sens de plus en plus l'envie de faire de la recherche me saisir. Et puis, c'est un moyen de retourner ici. Partir un peur, pour mieux revenir. Et la fin n'est qu'ajournée.

Le dernier billet de mon blog n'est pas pour aujourd'hui. Mais le dernier billet écrit au Québec, si.

jeudi 16 juin 2011

Bye bye Barbary Lane.


Le jour où j'ai su que j'irai au Canada, j'ai imaginé un tas de choses. Ma vie à Québec, des rencontres potentielles, et surtout, les voyages que je rêvais de mener depuis un moment. Il y a eu Montréal, fantasmée et crainte; New York, rêve de tout Occidental, à deux reprises; il y avait aussi San Francisco. Je voulais au départ y vivre, puis partir un an; au final, nous terminons notre périple par 8 jours dans la ville du Golden Gate. 8 jours, ce n'est rien, et pourtant, c'est encore un rêve qui se réalise. Les souvenirs de Michael Tolliver dans la tête, j'entreprends la découverte de San Francisco.

On compare souvent New York et San Francisco, de par leur taille, de par la diversité des paysages. L'une à l'Est, l'autre à l'Ouest. Mais tant de différences! New York, c'est la montre à la main, les aiguilles qui tournent vite, le rythme qui s'accélère, au son des taxis; on court dans New York, on veut de l'énergie, de la supériorité, la vie est grande. A San Francisco, rien n'est pareil. Il y a un air de nonchalance, de plaisir assumé et ralenti. On hait facilement les quelques quarante collines, parfois difficiles à grimper, mais le plaisir est dans la marche, dans le temps qu'on prend, les instants immobiles et le sentiment que tout s'est arrêté un jour.
C'est la ville hippie, où l'on traverse Haight avec les senteurs de la marijuana et les couleurs chatoyantes des vêtements du Flower Power. C'est la ville gay, avec le Castro, où les hommes se promènent nus, et où le drapeau arc-en-ciel rappelle la fierté et la différence du lieu. C'est la ville polémique, avec le City Hall, où fut tué Harvey Milk, et cescentaines de manifestations par année, sur Market. C'est la ville de l'art, avec SoMa, son art moderne et ses hipsters assumés. C'est la ville riche, avec sa Marina, ses maisons en bord de mer, frayant avec la plage et le vent, qui n'arrête jamais. Au loin, Alcatraz, et encore plus loin, le Golden Gate Bridge, imposant et doré, gardien d'une ville hors-du-commun. San Francisco, ville asiatique, européenne, indienne, au carrefour de mouvances et d'idées révolutionnaires et exubérantes. On y protège des valeurs, on en défend de nouvelles. Et si New York fait fi du passé, pour se tourner continuellement vers le futur, San Francisco multiplie les visages anciens et nouveaux.

Les maisons sont roses, bleus, vertes; les habitants, souriants, en colère, sentimentaux. Il y a de la vie, la vraie, celle à fleur de peau, choquée par les décisions gouvernementales, bouleversée par l'Etranger, toujours bien vu à San Francisco. On rit beaucoup, on parle énormément, il y a de l'échange. Je rencontre Lucas, originaire du Colorado, qui a décidé de vivre son rêve américain dans la contre-culture américaine, ici. Il veut voyager, découvrir, mais sa maison est ici; il est heureux d'habiter à San Francisco, et se dit que bien des gens voudraient être à sa place. Il n'a pas tort.

Parfois, nous sortons de San Francisco. Un vélo, pour rouler le long de la Marina, passer le Golden Gate Bridge, et terminer par un fish and chips à Sausalito, de l'autre côté de la Baie. Il fait si beau, malgré ce vent océanique qui rafraichit parfois nos coups de pédales appuyés. Un jour, nous louons une voiture, pour nous rendre dans la Yosemite Valley. Marcher le long des cascades, de la retenue d'eau d'Hetch Hetchy, et admirer le Capitan, dans un décor tout droit sorti du Seigneur des Anneaux. Un autre jour, nous affrontons le brouillard, à Point Reyes, à la découverte des côtes déchiquetées de la Californie.


Nous. Mais au final, San Francisco est davantage une découverte personnelle. Je me sépare souvent d'Anais. C'est un projet, vieux, si vieux, qu'il ne doit pas être terni par quelqu'un, si précieux soit-il. Alors, comme à mon habitude, je prends le poûls de la ville. Je ressens les gens, les choses, les rues et ces maisons victoriennes sans âge. Un café, un banc dans un parc, ou simplement arpenter la côte Pacifique, avec La Porte d'Or tout au bout du chemin. La conclusion, elle se fait à San Francisco. De Lyon au Golden Gate Bridge, l'ultime destination, c'est le temps d'un retour sur soi.

lundi 6 juin 2011

On the road again, again...

Mardi 31 juin commence notre road-trip en Washington et Oregon. Six jours, de nombreux arrêts prévus, de la marche, de la montagne, de la ville, et le Pacifique, à aller saluer une nouvelle fois, côté américain (en effet, à Vancouver, nous avons déjà trempé les pieds dans l’océan). Nous nous rendons à l’aéroport Sea-Tac, chez Trifty, pour prendre notre petite auto. Nous ne la rendrons pas dans le même état, 6 jours plus tard. Mais ça, c’est une autre histoire.

Notre premier arrêt : le Mont Rainier. Nous avons réservé deux nuits dans un motel à Packwood, petit village, véritable porte pour les sentiers du volcan de plus de 4 000 mètres. Mais nous ne nous y rendrons que le soir ; avant cela, nous entrons dans le National Park of Mount Rainier, moyennant un pass-voiture pour 7 jours. Un tour au centre d’information de Longmire, il fait soleil, mais les nuages menacent. Nous décidons de prendre un sentier de 5 miles (8km environ) en direction d’une cascade. Au cours de notre ascension, la pluie se fait connaitre, d’autant qu’au sol, la neige est encore présente. Au bout de dix minutes, nos vêtements et nos pieds sont trempés. Nous traversons un cours d’eau, et arrivons enfin à ladite cascade, pour très vite redescendre. Le temps ne se prête pas à la longue méditation face aux éléments. Plus nous redescendons vers Longmire, plus le soleil perce, à travers les nuages ; la pluie s’arrête, et bientôt, nous remettons nos lunettes de soleil.

Nous reprenons la voiture, déçus. Mais une belle surprise nous attend. Nous devons traverser tout le parc pour rejoindre Packwood. Ainsi, au détour d’un virage, trônant au-dessus des sapins, le Mont Rainier s’élève. Nous poussons tous les deux un cri, prenons mille photos de cette image magique ; le sommet n’est pas caché par un nuage, comme nous l’apprendrons le lendemain. Nous nous arrêtons pour faire des photos, capturer cet instant de grâce intense. Puis, sur le chemin du retour, nous croisons marmotte et oiseaux des plus étranges. La vallée s’approche, nous perdons de l’altitude, sur notre énorme montagne, pour déboucher dans une passe, où se trouve Packwood et le petit motel.

Ce soir là, nous dormirons tôt, après une petite bière au saloon du village (disons-le, Packwood, c’est le fin fond du monde).

Le lendemain, nous repartons au Mont Rainier. Mais le temps est plus capricieux que la veille, et nous ne verrons pas une once de ciel bleu ce jour-là. Cela ne nous empêche pas de marcher, le long d’un sentier long et pentu, qui rejoint un belvédère sur la vallée de Longmire. La forêt pluviale est une rareté dans le monde, et dans cette brume humide et désagréable, la couleur des arbres s’habille d’un vert unique en son genre. Après cette longue marche, nous reprenons la voiture, et nous rendonsà un petit sentier censé nous montrer des arbres millénaires. Petits que nous sommes, nous jouons les ridicules, au milieu d’une forêt d’arbres gigantesques.

Jeudi 2 juin, nous quittons Packwood, et le petit paradis terrestre du Mont Rainier, pour descendre plus dans le sud, à Portland. Mais nous ne prévoyons d’arriver dans la plus grande ville de l’Oregon que le soir. Avant cela, une vite au Mt Ste Hélène, fameux volcan rendu célèbre par le film Le Pic de Dante, et dont l’éruption de 1980 aura fait de grands ravages dans la région. Là encore, nous ne sommes pas bénis des dieux pour le temps ; la pluie est torrentielle. Nous faisons malgré tout route vers la montagne. A mi-chemin, nous nous arrêtons au bureau de poste d’un petit village. Nous y passerons vingt minutes, face à une employé stupide et absolument pas qualifiée qui, si je ne l’avais pas surveillée, n’aurait pas envoyé toutesmes cartes du Mont Rainier, ni mis le nombre de timbre nécessaire. Cette anecdote passée, nous prenons le chemin du volcan, toujours sous un ciel menaçant. Plusieurs fois, nous croisons la pluie. Et arrivés à Johnson Observatory, le point d’information le plus près du cratère, le cataclysme se fait annoncer. Nous avons malgré tout le temps de prendre quelques clichés du paysage apocalyptique : le cratère, les arbres encore calcinés, après la rage de l’éruption de 1980. Et ces nuages, qui n’annoncent rien de bon, et nous font déguerpir plus vite que prévu.

A Portland, nous logeons chez Kristlan, Moses et Roman, trois colocataires. Nous ne sommes pas les seuls : la maison est un véritable lieu de passage, et nous sommes environ 10Couchsurfers à loger ici. Nous n’aurons aucun de lien avec les trois colocs, contrairement à Christopher et Hneri-Bastien, nos logeurs de Seattle. Néanmoins, nous rencontrerons ici Alban et Adèle, qui nous rejoindront pour remonter la Columbia River. Pour l’instant, nous sommes à Portland, jolie ville que nous décidons de visiter le 3 juin. Chanceux, il fait un temps superbe dans la ville, et à pieds, nous marchons dans le centre-ville, ombragé et verdoyant. C’est une plus petite ville que Seattle, Portland ; écolo, très bobo si l’on veut. S’annonce bientôt la fête des Fleurs, événement principal de la ville, et déjà sur la place du Pioneer Courthouse, s’amoncèlent les bouquets floraux les plus réussis. Nous montons au Washington Park, où, de loin, nous voyons le Mont Hood, autre volcan impressionnant. Et en fin de journée, nous arrivons même à voir le sommet du Mont Ste Hélène, dégagé aujourd’hui. Nos visages et nos bras sont rouges, le soleil et la ville, aussi écologique soit-elle, nous enflamme.

Le lendemain, nous sortons pour la journée de Portland, accompagnés d’Alban et d’Adèle, rencontrés la veille (les quatre A en voiture !). Après un déjeuner très copieux,nous longeons la Columbia River, l’un des plus grands fleuves nord-américain. Nous avons déjà vu la Columbia, dans l’Est du Washington : ses falaises découpées et rougies par le soleil et le vent. Ici, c’est le vert, les arbres, et les nombreuses cascades, le long de la rive. Nous nous arrêtons de ci delà, et entreprenons une grandemarche de 400 mètres d’ascension, afin de dominer le fleuve, les montagnes. Au loin, d’un côté, le Mont Ste Hélène et le Mont Adam ; de l’autre côté, le Mont Hood. Nous continuons notre route, pour terminer à Hood River, porte d’entrée pour les champs et les verges avoisinant le Mont Hood. La vue est sublime, et un paysage de Toscane, dominé par l’imposant volcan, nous surprend et nous ravit. Je voudrais rester des heures, devant cette cartepostale vivante, tout comme le Mont Rainier. Mais il faut rentrer, la route est longue, pour repartir à Portland, et il est déjà 18 heures.

Dimanche5 juin. Le jour où nous découvrons, catastrophés, que quelqu’un est rentré dans notre voiture. Panique vite calmée, par un restaurant où nous avons la possibilité de cuisiner nos propres pancakes. Miam. Puis c’est l’heure de partir, le char abimé. Nous rentrons par la côte Ouest. De Portland, nous rallions Cannon Beach, station balnéaire huppée dominée par un rocher posé là, dansle Pacifique. La brume lutte courageusement contre le soleil, et les vagues semblent ravir les quelques courageux qui osent braver la température extrême de l’eau. Nous reprenons vite la route, vers Astoria, ville de cinéma, qui servit de décors pour de nombreux films. Pas d’arrêt en voiture, seulement circuler dans le village, prendre des photos de ces maisons victoriennes qu’on retrouve, dans quelques plans célèbres, sur le grand écran. Le temps de prendre le pont qui traverse la Columbia River (encore elle !), et nous voici à nouveau en Washington. La route est longue, quatre heures à peu près, sur des chemins où nous sommes seuls. Nous traversons deschamps, des forêts protégées, des villages déserts, jusqu’à ce que, juste avant de reprendre l’autoroute pour Seattle, le Mont Rainier, prince en ces lieux, nous salue de son sommet enneigé. Un vieil ami, à qui nous rendons son salut, avant de quitter la région, et de le revoir, qui sait, un jour prochain.

C’est une boucle qui se ferme. Arrivés à Seattle le 25, nous retournons une dernière fois dans cette ville, avant de quitter le nord américain, et de descendre, vers la Californie. Une roue crevée et une galette changée, grâce à Christopher et Henri-Bastien (quelle chance, onlogeait chez eux !), nous rendons la voiture, sans rien avoir à payer pour les petits dommages causés plus ou moins involontairement (j’avais pris une assurance, prévoyant que je suis). Puis le Sea-Tac,où nous attend notre avion pour San Francisco. De nouveaux décors, de nouvelles personnes nous attendent, là-bas. Etde l’Oregon et du Washington, nous emportons une fatigue intense, mais surtout la satisfaction de plus de 10 jours d’aventures incroyables et imprévues. Seattle n’est pas pour moi la ville de cœur, mais un souvenir, aux accents étranges et à l’odeur de Starbuck’s et de sous-bois humides, reste gravé en moi.


mardi 31 mai 2011

Dans l'Orient désert, quel devint mon ennui!


Christopher, notre Couchsurfer de Seattle, nous invite dès le premier soir à une expédition de trois jours: le weekend du Memorial Day comptant trois jours, sa gang d'amis et lui partent dans l'Est du Washington, après les chaines de montagnes enneigées et pluvieuses. Près du Montana, là où le sol est aride et où TRES peu de gens vivent. Nous acceptons, en ayant l'idée de faire quelque chose hors du commun, et surtout, pas prévu dans notre planning. Le Mt Rainier attendra; pour l'instant, nous préparons duvets, tente et sac à dos pour trois jours dans le désert.


Nous rejoignons tous les amis de Christopher à Ellensburg, petite ville ensoleillée près des autoroutes pour le centre des Etats. Il y a Tyler et Lea, petit couple avec qui nous sympathisons d'emblée, et ce malgré la barrière de la langue (Anais a en effet beaucoup de mal avec l'anglais); Jay, originaire de la Nouvelle-Orléans, lunatique mais très sympa; Nany et son chum Punit, et Jason. Trois voitures, qui se dirige vers The Ancient Lake, dans les anciennes gorges de la Columbia River. Nous voyons justement la Columbia, que dis-je, nous la traversons, et nous arrêtons pour voir les falaises abruptes, et le désert de plantes sèches qui s'étend, jusqu'au parc des éoliennes, solitaires dans ce paysage tout droit sorti d'un jeu vidéo.

La première journée de marche est éreintante, décevante, car nous devons faire demi-tour pour retrouver les voitures et prendre la VRAIE route du campement, au milieu des falaises, mais malgré tout, chacun est heureux de cette journée. Et malgré les moustiques qui, peu à peu, dessinent une carte du relief américain sur nos pauvres peaux (les salauds!), nous voyons sous nos yeux un désert, au sens propre comme au figuré. Nous sommes les seuls, à arpenter ce sol rouge ou marron clair, que traverse un petit cours d'eau, et qui débouche sur un lac grandiose. Nous trainons une glacière avec nous, ce qui vaut quelques paniques et fous rires, quand il faut descendre les falaises. Mais nous nous installons malgré tout près de ce Ancient Lake, ravis du paysage et de la beauté silencieuse du lieu.


Le lendemain, Tyler et Jay restent au campement, profitent de la solitude du lieu et des sentiers cachés de l'endroit. Nous marchons 45 minutes pour retrouver la voiture. Nous ne ferons que ça: conduire, trouver quelques lieux de randonnées, les faire à moitié, puis remonter. Des plans qui tombent à l'eau, mais qu'importe! l'ambiance est excellente. Dans la voiture, nous sommes trois Français, s'en donnant à coeur joie pour parler de tout ce que nous découvrons. Nous trouvons, au hasard d'un mirage, d'une falaise déchue, une ferme, une vigne, un signe de vie dans l'immensité d'une plaine américaine à l'abandon, jamais découverte, et qu'on ne répertorie sur une carte que par un nom insignifiant.
Le troisième jour, après une veillée arrosée de rhum, de vin et parfumée d'herbe à la pipe autour d'un feu de camp, nous faisons nos sacs, au milieu des serpents et des falaises, insouciantes et majestueuses. Le temps de s'arrêter à Ellensburg, manger ensemble une dernière fois, et de quitter ces personnes, qu'on a vraiment aimées. On s'échange des adresses, mais dans le fond, ce n'est qu'un lien qui s'éffilochera avec le temps. Seul le souvenir de ces visages, éclairés par les flammes du feu de camp. Tyler et son bacon, Léa si gentille, et Jay, et tous. Et surtout, ces gorges de la Columbia River, qui n'ont rien à envier au Grand Canyon.

vendredi 27 mai 2011

Hello Seattle, I am an albatross on the docks and your boats.

Suite du périple, cette fois, de l'autre côté de la frontière. De Vancouver à Seattle, quatre heures de bus, et la pluie, interminable. Nous réussissons malgré tout à apercevoir le Mont Baker, premier volcan d'une longue série d'autres montagnes, formant la chaîne des Cascades.

C'est Christopher qui nous reçoit chez lui. Rencontré via Couchsurfing, il est Québécois, une occasion donc, de renouer avec "le pays". Lui et son coloc', Henri-Bastien, sont ingénieurs informatiques chez Microsoft, et leur accueil est à la hauteur de la jovialité québécoise: simple, et très bavarde. Christopher nous donne de nombreuses idées pour notre voyage en voiture, et nous invite à aller trois jours avec lui et sa bande d'amis dans le désert, de l'autre côté des Cascades.

Seattle, c'est avant tout la ville de Starbuck's, Grey's anatomy, et Boeing. Bon, le Seattle Grace Hospital n'existe pas, Boeing est délocalisé à Chicago, restent donc les centaines de Starbuck's, qui se suivent dans les longues rues. Anais joue au jeu des différences: plus sale, plus cosmopolite, moins aéré que Vancouver. En général, les villes américaines sont différentes des villes canadiennes. Néanmoins, c'est une jolie ville animée, que Seattle. Nous marchons beaucoup, le Pike Place Market, le front de mer, la Space Needle (un coton tige sur lequel se serait posée une soucoupe volante) et la colline, qui permet d'admirer la ville, et au loin, le Mt Rainier, le plus haut volcan de la chaîne de montagne (il est prévu que nous allions y faire un tour prochainement).

Alors, la journée, nous marchons. Le soir, nous buvons, sur Capitol Hill, et nos hôtes nous font découvrir des endroits géniaux pour prendre un verre. Cela fait aujourd'hui une semaine que nous sommes dans l'ouest. Anais se fait au manque de la France, de son copain. Moi, je n'y pense pas, et chante sans cesse Owl City. En buvant le café, en regardant la vue devant nous, les montagnes, et derrière nous, encore l'océan, je ne ressens rien qu'un sentiment du "loin loin loin", ce qui rend encore plus excitant ce voyage.

Au passage, mon anglais est bon; Anais, elle, quand elle parle, fait un attentat à la langue de Shakespeare. Cela nous fait beaucoup rire, évidemment!

Le rêve continue. Prochaine étape: ce fameux désert, puis la voiture, Mt Rainier, Mt St Helens, et Portland. Tadaaaam!

lundi 23 mai 2011

Si vous n'aimez pas la mer, si vous n'aimez pas la montagne, si vous n'aimez pas la ville... allez vous faire foutre !

Un premier post, alors qu'il est bientôt 21 heures à Vancouver. Cela fait quatre jours bientôt que nous sommes ici, à neuf heures de décalage de la France, d'où la fatigue d'Anais, qui dort présentement; seulement trois heures de Québec, alors moi, je m'y suis fait vite, au rythme de la ville de l'ouest.

Tout n'est que verdure et vitres, dans cette cité où les tours de verres cherchent à égaler les montagnes, à côté. Pas mal de grattes-ciel lumineux, modernes, voire futuristes, et au pied, de nombreux jardins et espaces verts. En me baladant, je ne peux pas m'empêcher de repenser à cette discussion sur Vancouver, entre Francis et moi:

-Combien de jours faudrait-il rester, selon toi, à Vancouver?
-Une vie entière. Mes deux mois là-bas, j'ai capoté.
-OK!

Et Francis avait, encore une fois, raison.

Il y a le Pacifique, que nous avons effleuré hier, sur la plage de Kitsilano. Il y a la ville, ses grands trottoirs et ses immeubles résidentiels et commercials. Il y a de l'altitude, pas si loin que ça, et la Grouse Mountain, que nous avons vue aujourd'hui. Du relief, de la hauteur, de l'aérien, dans une ville qui respire la forêt de sapins et l'air marin, en même temps que les nombreux cafés et les nouilles chinoises de Chinatown.

Hier, alors qu'Anais dormait (jetlag, quand tu nous tiens!), je m’assois face aux montagnes, et au soleil, qui se couche et illumine les tours. Il a plu toute la journée, mais ce soleil, qui se réveille au même moment qu'il disparaît à l'horizon, réveille la chaleur qu'on pensait oubliée, au creux de nous. Quelques cartes postales plus tard, et alors que Coeur de Pirate chante à mon oreille (oui, je me mets à l'aimer, celle-là....), je me dis que ça y est: j'y suis, le rêve commence. Cette même sensation qui m'avait rempli, il y a neuf mois, lors de mon arrivée au Canada. Oui, je ne dis pas toujours Québec, j'ai appris à laisser tomber les illusions souverainistes, pour embellir ce beau pays multiculturel et uni à la fois.Neuf mois plus tard, le temps d'une renaissance pour ma part, alors que je revendique habiter la ville de Québec plutôt que Lyon, me voici là, de l'autre côté du continent, dans une ville qui porte les plus beaux espoirs, pour ce voyage décisif de ma vie.

Rien ne sera pareil, à mon retour en France. Et Vancouver semble présager de beaux souvenirs en devenir, qui me guideront pas à pas lors de mon réapprentissage de la vie française.