jeudi 9 septembre 2010

La recherche doit avant tout être un jeu et un plaisir.

Je me rends compte que je n'ai toujours pas écrit sur les cours que je suis à l'université. Bon, qu'on me pardonne, ça ne fait que deux semaines que nous sommes rentrées. Et au bout de deux semaines, difficile d'imaginer ce qu'est vraiment un cours. Article donc sans photo (je ne vais pas faire un portrait des bouquins et des plans de cours, je vous laisse imaginer) sur mes premiers pas dans la maitrise en études littéraires au Québec. Je précise bien: AU QUEBEC. Parce que tout ce que je fais ici, n'a RIEN à voir avec les cours proposés à Lyon 2. J'aurai le plaisir d'en parler davantage quand je devrai justifier mes équivalences une fois rentré en France.

J'ai déjà un premier rendez-vous avec Françoise Gillis, conseillère pour les études. Elle s'occupe des étudiants étrangers et les inscrit aux cours. Une heure et demie en retard, mais je lui pardonne très vite: elle aime parler à des littéraires! Elle me fait choisir deux cours. Le choix est vite fait, il n'y a que 6 cours possibles: je m'inscris donc en "séminaire de maitrise" (3 crédits) et en "littérature et culture médiatique en France de 1860 à 1930" (6 crédits). Le premier est censé me faire acquérir une méthodologie efficace pour mes recherches et mon mémoire; le second en revanche, me fait douter. Je ne connais rien à la culture médiatique, et mon intérêt pour le journal est à peu près équivalent avec celui pour l'arithmétique. Mais soit! c'est un défi que je me lance. Malheureusement, je ne suis qu'à 9 crédits. Pour être étudiant à temps plein, il me faudrait 12 crédits, ce qui est déjà beaucoup au Québec. Et pour faire coïncider mes crédits avec ceux de la France, je dois en avoir 15. Autant dire que je n'y suis pas! Petit tour d'horizon des autres cours: la littérature francophone africaine? Surement pas!!! La dramaturgie becketienne?.... Ca se passe de commentaire! Mince, le cours de théorie littéraire est déjà plein à craquer; c'était la seule matière correspondante en France. Je demande donc à consulter les cours de 1er cycle. "Un cours magistral sur la littérature québécoise, ça vous dirait?". Ohhh oui! J'en suis à 12 crédits. Madame Gillis me conseille de prendre rendez-vous avec des enseignants en relation avec mon sujet de recherche pour planifier un "sujet spécial": pendant la session, avec l'accord de l'enseignant en question, j'aurais une bibliographie à travailler, afin de rendre un écrit et présenter un oral avant les vacances de Décembre. J'y reviendrai à la fin de l'article.

Premier cours: Séminaire de maitrise: peu de choses à dire. Je ne l'ai eu qu'une fois; lundi dernier était ferié, fête du travail oblige! Mais c'est apparemment un cours basé sur les tables rondes entre étudiants, afin de discuter de nos recherches, de l'avancement de notre mémoire, blabla... La professeur demande d'ailleurs à chacun de se présenter et de dire quelques mots sur son sujet de mémoire. Ah aaah!!! Là, panique: chacun a déjà son sujet bien précis en tête, et tous ont commencé à faire leurs recherches. Aie, c'est à moi: "Euh, Adrien R., j'viens de France. J'hésite sur plusieurs sujets de mémoire, mais je penche pour une comparaison entre Anne Hébert et Laure Conan." Deux élèves éclatent de rire, et la professeur me regarde avec compassion.

Deuxième cours: Littérature et culture médiatique en France entre 1860 et 1930: je vais au cours avec un sacré a priori. Si ça ne me plait pas, à la pause, je pars. Etudier des journaux, et puis quoi encore? Premières minutes, je me rends compte que le professeur n'a pas d'accent. Parfois, quelques québécismes dans les mots, mais il me semble qu'il est français. D'ailleurs, il nous raconte ses vacances en France, dans les Alpes: tellement exotique, que tous les étudiants québécois écoutent attentivement... Je gribouille en regardant le plan de cours: programme chargé! Deux colloques prévus, dont un, sur, à Sherbrooke; un colloque terminal à animer nous-mêmes, et un dossier final... Néanmoins dès le premier cours, j'accroche. Je tente d'oublier le doctorant en culture médiatique assis derrière moi qui connait déjà tout au sujet, ainsi que le blond un peu lèche-bottes qui est tout devant, en train de pavoiser quand le professeur le félicite pour la publication de son mémoire de maitrise. Le deuxième cours se passe très bien, des choses intéressantes, et surtout nouvelles! Je me réjouis d'être resté!

Troisième cours: Littérature québécoise, des origines à nos jours: j'entre dans l'amphithéâtre, et me voici déjà en train d'étouffer. Pas de fenêtres, et une centaine de filles en fleur qui piaillent à tout bout d'champ. Normal, je suis dans un cours de premier cycle, et la plupart des élèves -féminins, donc- sorte à peine du Cegep. Ca parle de chum, de l'université "qui est trop graaaaande", ça philosophe un peu. Je trouve Carine, tout aussi paumée que moi dans ce harem post pubère, nous nous réfugions au même bureau. Le professeur, un vieux barbu, rentre. L'heure suivante est affreuse: le bonhomme nous présente ses oeuvres critiques, et exerce une publicité implacable concernant le Dictionnaire des Oeuvres québécoises qu'il a lui-même dirigé. Il se jette des fleurs, et Carine et moi n'en pouvons plus. Après coup, j'apprendrai qu'il a été décoré plusieurs fois par le gouvernement québécois pour son aide à l'édification d'une culture québécoise renommée... Ce n'est qu'au deuxième cours, cette fois seul (Carine a pris peur et m'a laissé seul) que je comprends toute l'étendue de savoir d'Aurélien B. Derrière cet étalage de soi, se "cache" (peut-on vraiment utiliser ce verbe?) un puits de science, qui sait tout et connait tout. Premier vrai cours donc, qui nous parle de la littérature de la Nouvelle-France. Je prends beaucoup de choses en notes, j'ai peur de n'avoir l'occasion d'entendre ça qu'une fois dans toute ma vie.

Revenons au "sujet spécial", le dernier cours, (et ce n'en est pourtant pas un) qui me permettra d'acquérir l'intégralité de mes fameux crédits. Ca commence sur le site de l'université, en recherchant les spécialités de chaque enseignant. Je tombe sur un nom et un descriptif intéressants: Chantal S. Pratique littéraire des femmes. Ah, voilà qui m'intéresse! Deux mails plus tard, me voici dans un bureau étroit, face à une trentenaire aux cheveux longs qui a toujours le sourire. D'entrée, elle me demande ce que je compte faire comme mémoire. Je lui explique, en 5 minutes, le sujet que j'ai choisi. Je précise que depuis le séminaire de maitrise, j'ai essayé de trouver plus de matière à mon projet! Au final, elle est ravie: "c'est super que vous connaissiez Laure Conan. Vous êtes étonnant, et votre sujet est très intéressant. Personne n'a jamais pensé à rapprocher ces deux auteurs, et pourtant, la connexion semble logique, d'après vos dires." Elle adore Laure Conan, et me propose un plan de cours portant sur les femmes écrivain du XIX ème et début XXème. Toujours emballée, elle me pose une question: "connaissez-vous le Centre de Recherche sur la Littérature et la Culture québécoise de l'Université Laval?". Euh... Non! "Eh bien faites-en partie." Elle m'abonne à la newletter du centre, et me fait visiter deux salles strictement réservées "aux étudiants chercheurs et aux enseignants": une salle à manger privée, et une bibliothèque avec de nombreux ouvrages anciens, dont des romans de 1850 dans leur édition originale! Me voici donc chercheur pour le compte de l'Université Laval. Elle me dit que mes travaux pourraient même être publiés, une fois la soutenance de maitrise passée... D'accord!

Que retenir, donc, de ces deux premières semaines?... Qu'il va y avoir du travail! Plusieurs dossiers à rendre avant Décembre, et des oraux à préparer toutes les deux semaines. Je regarde un moment le programme de Master 1 Recherche de Lyon 2... Et finalement, malgré la surcharge de travail qui pèsera sur mes épaules cette session, je suis heureux d'être ici!

3 commentaires:

  1. Pourquoi ça les a fait marrer dans l'amphi ton sujet ?

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  2. En gros, Laure Conan et Anne Hébert, ce sont des auteures qu'ils détestent... Et c'est, selon eux, passé de mode d'étudier ces bouquins-là.

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  3. Je vois... Mais ils apprendront vite à ne plus rire quand ils verront que toi-même tu es passé de mode ! ;)

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